Je suis Pape Gaye, Président Directeur Général de Intrahealth International et je suis aussi un des membres fondateurs du Partenariat de Ouagadougou.
Sur les défis qui restent à relever pour que le PO soit un succès après 2020
Je suis très satisfait des résultats qu’on a pu avoir jusqu’à présent mais je continue à penser que le succès que nous avons pu réaliser reste quand même fragile.
Donc, pour moi avant même de penser à l’après 2020, il faut réfléchir à comment consolider les acquis que nous avons pu avoir. Pour cela, il faudrait peut-être faire une analyse du travail qui reste à faire. Ils sont à plusieurs niveaux. Mais reconnaissons que les résultats sont bons, ils sont au-delà de ce qui était attendu. Quand le PO a été mis en place, on se préoccupait principalement de l’adhésion et de l’engagement effectif des leaders surtout au niveau des gouvernements. Les résultats que nous avons aujourd’hui montrent qu’on a dépassé le cadre du secteur public. Il y a notamment l’engagement des jeunes qui a été un succès que les gens n’avaient pas vraiment anticipé. Il y a l’engagement de la société civile etc…
Le travail qui reste à faire, c’est d’élargir la gamme des parties prenantes. Je pense qu’il y a des parties prenantes qui doivent être engagées et qui doivent participer hâtivement dans le partenariat. Le travail qu’il y a à faire avec le secteur privé reste très important et je crois que le succès de l’extension des réalisations des progrès que nous avons, c’est dans l’engagement du secteur privé. Pour moi, ça reste le problème majeur : comment engager de façon effective le secteur privé pour la planification familiale et pour le renforcement des systèmes de santé en général.
Je pense aussi qu’une approche multisectorielle effective fait partie des facteurs qui vont nous permettre d’aller encore en avant parce que la santé est un domaine qui travaille un peu en vase clos. Il faudrait travailler par exemple beaucoup plus en étroite collaboration avec le secteur de l’éducation, de l’environnement, de l’agriculture, la sécurité alimentaire etc…
Pour moi l’après 2020 ne peut pas être réussi tant qu’on arrive pas à engager les autres secteurs.
C’est bien d’avoir des gens qui viennent à la RAPO (Réunion Annuelle du Partenariat de Ouagadougou). Nous sommes tous passionnés, nous sommes tous engagés mais nous avons besoin de ceux qu’il faut convaincre, ceux qui continuent à résister parce que ce ne sont pas des gens de notre domaine mais ce sont des gens qui sont loin et tant qu’on n’arrive pas à les faire participer, nos résultats seront mixtes.
Il faut nécessairement que l’après 2020 soit une affaire de jeunes. Je crois qu’on doit même dépasser le fait de voir comment impliquer les jeunes et plutôt les prendre comme plateforme de base et élargir les choses à partir de ça.
On commence à exploiter les nouvelles technologies de l’information et on est en train de voir le bout de l’Iceberg. Il faudra l’exploiter à fond parce que je crois qu’avec une utilisation effective, on pourra aller très vite. Il faut s’assurer que les prestataires de services ont la formation qu’il faut pour l’utilisation des nouvelles technologies. Mais je crois qu’on a une bonne base parce qu’une des réussites du Partenariat de Ouagadougou, c’est la très bonne participation de EtriLabs et d’autres boites qui travaillent dans ce domaine.
Il faut dire que notre sous-région aussi a de nouveaux problèmes et il faut qu’on en tienne compte. La sécurité par exemple est un problème auquel il faudra faire face parce qu’il devient sérieux. C‘est un problème de ressources parce que si nos pays, qui n’ont pas déjà suffisamment d’argent pour financer les programmes de PF, doivent maintenant se soucier de comment protéger leurs populations, c’est un nouveau sérieux problème. Mais je crois qu’il faut penser positif et réfléchir en tant qu’africain. C’est le tour de l’Afrique, c’était celui de l’Asie et autres. L’Afrique va décoller et commence à décoller et je pense que la PF a son rôle à jouer et il faudrait qu’on arrive à engager toutes les bonnes volontés, toutes les communautés parce que la PF est une affaire de tous.
Alors ceux qui résistent aujourd’hui, c’est parce qu’ils n’ont pas la bonne information. Mais on ne peut pas réussir le développement économique sans des programmes effectifs de PF.
J’ai une vision très positive de l’avenir. Je crois aux ressources humaines que nous avons aujourd’hui. Je crois en la jeunesse et je crois en notre capacité en tant qu’africain à gérer les choses, de nos propres mains. Je remercie les bailleurs pour ce qu’ils ont donné jusqu’à présent et je pense qu’on peut utiliser tout ça pour aller plus loin dans le futur.
Sur le rôle et le fonctionnement de l’Unité de Coordination après 2020
Si la décision me revenait, j’aurais dit qu’il faut utiliser la plateforme qu’on a pu bâtir avec l’UCPO et l’améliorer.
Je pense qu’on a une plateforme de coordination qui a fait ses preuves et je crois que ce n’est pas le moment de tout démanteler et de recommencer.
Il faut bâtir des acquis que l’unité a pu avoir, l’élargir pour résoudre les problèmes dont j’ai parlé plus haut, c’est-à-dire, avoir des voix supplémentaires, et voir comment en faire une plateforme multisectorielle.
Il ne faut pas trop compliquer les choses. On a quelque chose qui marche et quand c’est le cas, il ne faut pas le détruire, il faut essayer de le bâtir convenablement et le consolider.
Interview réalisée par EtriLabs